Antoine KREMER
Head of European Affairs at ABBL, ALFI and ACAEn février 2022, l’ABBL et l’ACA ont signé une convention de partenariat renforçant la collaboration entre les deux associations. Ce nouveau partenariat se matérialise notamment par le fait que le bureau commun de représentation des affaires publiques de l’ABBL et de l’ALFI défendra désormais également les intérêts des assureurs luxembourgeois. Dans ce contexte, nous vous invitons à venir rencontrer nos collaborateurs à Bruxelles.
Interview avec Antoine Kremer, responsable des affaires européennes de l’ABBL, de l’ALFI et de l’ACA
« Nous devons être capables de convaincre, au plus haut niveau, en saisissant les occasions qui nous sont données de rencontrer le Commissaire en charge du secteur financier. »
Antoine Kremer,
Antoine, quand et pourquoi l’idée d’un bureau de représentation à Bruxelles est-elle née ?
Le bureau a été fondé conjointement par l’ABBL et l’ALFI en 2006. Il n’y a pas eu d’événement déclencheur à proprement parler, mais plutôt le résultat d’une longue maturation qui a commencé au début des années 2000, alors que j’étais attaché parlementaire d’un député européen. J’avais des échanges réguliers avec l’ABBL et l’ALFI et peu à peu la nécessité d’ouvrir un tel bureau s’est imposée aux associations, d’autant plus que le cadre réglementaire du secteur financier se forgeait de plus en plus à Bruxelles. Rappelons que le premier plan d’action de la Commission dans ce domaine date de 1999.
Je me suis lancé seul en 2006. Nous faisions partie des précurseurs, car au niveau des associations bancaires étrangères, seuls les Allemands, les Français et les Italiens étaient présents à Bruxelles à l’époque. En 2011, avec la vague de réglementations qui a suivi la crise financière de 2008-2009 – ni plus ni moins que 48 directives et règlements – la nécessité d’engager une deuxième personne s’est imposée. En 2012, nous avons commencé à faire appel à des stagiaires. Et maintenant que l’ACA nous a rejoints, nous avons recruté un troisième membre du personnel.
Quels sont les principaux défis que vous avez rencontrés depuis 2006 ?
Je dirais qu’elles sont de deux ordres : la perte de crédibilité des professionnels de la finance aux yeux des autorités politiques et le fait que le Luxembourg est, pour des raisons structurelles, régulièrement isolé dans la défense de certains intérêts.
Commençons par la perte de crédibilité. Jusqu’en 2007, la voix des professionnels de la finance valait son pesant d’or. Nous étions les experts, et nos avis étaient généralement bien accueillis par les législateurs lorsqu’il s’agissait d’élaborer de nouvelles directives ou de nouveaux règlements.
La crise financière de 2008 et 2009 a changé la donne. Les dysfonctionnements du secteur financier étaient certes graves, mais du jour au lendemain, nous sommes devenus des personnes dont il faut se méfier. Nos paroles ont été accueillies avec un préjugé négatif. Comme l’a dit Warren Buffet : « Il faut 20 ans pour construire une réputation et cinq minutes pour la détruire« . Nous rétablissons lentement la confiance, mais nous ne sommes certainement pas encore revenus à la situation d’avant la crise.
Il convient également d’ajouter à ce contexte le fait que pour certains de nos interlocuteurs, le Luxembourg, quoi qu’il fasse, sera toujours considéré comme un paradis fiscal. Cette idée préconçue ne nous aide pas non plus à recréer des liens.
Est-il juste de dire que depuis le Brexit, le centre financier luxembourgeois est plus isolé en termes de plaidoyer ?
Avant le Brexit, il y avait un centre financier international basé dans un grand pays et deux dans des petits pays. Maintenant, il n’y a plus que ces deux derniers. Donc oui, avec le Royaume-Uni, nous avons perdu un allié sur de nombreux sujets. Et c’est le deuxième défi auquel je faisais référence.
Mais, tout comme nos interlocuteurs du ministère des Finances, nous avons une culture combative et savons nous faire entendre. Depuis le référendum de 2016, nous n’avons cessé d’adapter et d’améliorer nos capacités de plaidoyer, notamment en collaborant plus étroitement avec des représentants d’autres centres et secteurs financiers partageant les mêmes idées, et en étendant notre réseau et notre efficacité dans ce que nous faisons.
Un exemple récent est le traitement des banques dépositaires dans l’AIFMD, où nous sommes plutôt seuls, mais où finalement, à force de travail, nous semblons avoir obtenu gain de cause avec les textes qui ont été sur la table au cours des derniers mois et demi.
Comment rétablir notre crédibilité et un climat de confiance avec nos interlocuteurs à Bruxelles ?
Nous devons être présents et proches. Chaque fois que l’on nous demande notre avis, nous devons démontrer que nous apportons une valeur ajoutée.
Nous devons être capables de convaincre, au plus haut niveau, en saisissant les occasions qui nous sont données de rencontrer le Commissaire en charge du secteur financier. Cela se fait au moins une fois par an. Une fois que le commissaire est convaincu que nous avons un sujet, il demande confirmation à ses conseillers. Il faut aussi, et c’est aussi important sinon plus, préparer le terrain au niveau N-1. C’est là que la législation de base est élaborée et que nous rencontrons les personnes qui la mettront en pratique.
À quoi ressemble une journée normale pour un conseiller en affaires publiques ?
Une journée normale, ça n’existe pas. Mais voici à quoi peut ressembler notre quotidien.
La plus grande partie de la journée est consacrée aux dossiers techniques avec les experts de l’ABBL, de l’ALFI et de l’ACA, car fournir du contenu et des données pertinentes à nos interlocuteurs est l’essence même de notre travail.
La journée peut également être ponctuée par un petit-déjeuner ou un déjeuner informel avec un député européen ou un attaché parlementaire. Nos premiers interlocuteurs ici sont les députés européens luxembourgeois et leurs équipes. Nous avons la chance que certains d’entre eux siègent et soient actifs dans les commissions qui sont importantes pour la place financière. Au fil des années, nous avons également constitué un réseau important de députés d’autres Etats membres et de leurs assistants que nous rencontrons aussi régulièrement pour échanger sur les questions importantes pour la place financière luxembourgeoise. Il convient toutefois de souligner ici une évolution importante. Si auparavant, la plupart des sujets qui nous concernaient étaient traités par la commission économique et monétaire, aujourd’hui les initiatives d’autres commissions telles que la commission de l’environnement, la commission des libertés civiles ou la commission juridique nous touchent également.
Bien sûr, il y a aussi des réunions de travail plus formelles avec le personnel de la Commission ou les attachés financiers des États membres. Et nous rencontrons régulièrement, sur une base hebdomadaire, bimensuelle ou mensuelle, nos collègues des autres fédérations ou de la Fédération bancaire européenne.
Nous participons également à de nombreuses conférences ou tables rondes thématiques et représentons nos trois associations à diverses réceptions, qui sont autant d’occasions d’élargir notre réseau et de faire passer à nouveau nos messages.
Quels seront vos principaux sujets dans les mois à venir ?
Nous avons un ordre du jour très chargé. Je me contenterai de citer les points suivants : le paquet bancaire, y compris le traitement des succursales de pays tiers dans la CRD, CRR, BRRD, les paiements instantanés, la révision de la PSD2, Open Finance, CSDDD, AIFMD, la réglementation des fonds du marché monétaire ; Solvabilité II, IRRD, le paquet AML, la fiscalité, la stratégie et le paquet d’investissement de détail, la directive sur la responsabilité des produits, etc. Nous ne serons pas trop de trois pour traiter toutes ces questions.
Qui sont nos collègues à Bruxelles ?
Antoine Kremer a mis en place et dirige le bureau de représentation de l’ABBL, de l’ACA et de l’ALFI à Bruxelles. À ce titre, il est chargé de représenter les trois associations auprès des institutions européennes.
Antoine a une expérience professionnelle auprès de plusieurs institutions européennes dont la Commission, le Parlement et le Conseil et une expérience pure de plaidoyer de 16 ans. Il est titulaire d’un diplôme en affaires internationales de l’Université de Louvain-la-Neuve (Belgique) et d’un Master en affaires juridiques européennes de l’Institut européen des affaires publiques. Antoine parle couramment le luxembourgeois, l’anglais, le français, l’allemand, l’italien et le néerlandais.
antoine.kremer@lux-finance.lu
Avant de rejoindre l’ABBL en octobre 2022, Xavier a travaillé au sein du cabinet de conseil en affaires publiques FleishmanHillard en tant que gestionnaire de compte dans la pratique des services financiers, où il a aidé un large éventail de clients leaders du marché dans leur stratégie d’affaires publiques.
Xavier est titulaire d’un master en économie politique de la London School of Economics et d’une licence de l’École supérieure de commerce de Grenoble.
xavier.bové@lux-finance.lu
Giorgia est stagiaire au bureau de Bruxelles et est chargée de suivre les réunions et les développements au sein des institutions européennes tout en assistant le reste de l’équipe dans leurs activités de plaidoyer. Avant de rejoindre l’ABBL, l’ALFI et l’ACA, elle était avocate en exercice au cabinet Lucchi et s’est spécialisée en droit pénal et fiscal (2020-2021).
Giorgia est titulaire d’un diplôme de droit de l’Université de Sassari (2020) et d’un diplôme d’études européennes avancées du Collège européen de Parme / MA en affaires européennes de l’Université de Parme (2021-2023). Elle parle couramment l’italien, l’anglais et l’espagnol.
giorgia.marteddu@lux-finance.lu
Et pour le clin d’œil amical
Si un jour, vous vous trouvez à Bruxelles, voici les recommandations gastronomiques de nos collègues.
Chou, place de Londres 4, 1050 Bruxelles
« My favourite around the European Parliament. Excellent French cuisine with a twist and a decently prized daily menu.” Antoine
Maison du Luxembourg, rue du Luxembourg 37, 1050 Bruxelles
“An institution among the EU institutions.” Antoine
Volta Supper Club, rue E. Solvay 10. 1050 Bruxelles
« After a delicious pizza for dinner, head downstairs and look for the speakeasy to continue your evening! » Leonardo
Mi Tango, rue de Spa 31, 1000 Brussels
“A paradize for meat lovers!” Giorgia